Adieu Gary
Nassim Amaouche
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Critique

Semaine de la Critique

Reprise de la Quinzaine des Réalisateurs au Forum des Images, de la 48ème Semaine de la Critique à la Cinémathèque française : Paris se fait cannois, palmiers et mer en moins. Public différent aussi, moins mélangé, parfois ayant pour moitié participé au film et s'en venant le découvrir. Depuis 1962 la Semaine de la Critique se consacre à la découverte de jeunes talents en sélectionnant des premiers ou deuxièmes films – la qualité épate (enfin bon, The Chaser était aussi un premier long-métrage), mais les projets sont nourris depuis parfois de longues années avant de voir le jour. Tout relativement cependant, puisqu'ensuite la distribution est souvent discrète, voire invisible, surtout pour ce qui est du court-métrage qui à chaque séance précède le long. Retour sur quelques projections.

Côté longs-métrages, la salle est comble pour accueillir le film de Nassim Amaouche, qui sortira en salles le 22 juillet. Adieu Gary raconte avec tendresse l'histoire des habitants d'une petite bourgade du sud de la France, vouée à la disparition par la fermeture de son usine. On entre dans ce lieu clos par le biais d'un jeune homme revenant dans sa famille à sa sortie de prison : microcosme à l'allure étrange de ville fantôme, à laquelle les fenêtres closes, les platanes alignés, la poussière soulevée par le vent, l'attente désoeuvrée, donnent des airs de western décalé. Tous les jeunes, représentants de la deuxième génération des immigrés maghrébins, ne rêvent que de fuir l'endroit et ses petits boulots merdiques (il faut porter des casquettes à oreilles de souris pour aligner des produits dans le supermarché), qui en « re »tournant au bled qu'il n'a jamais connu, qui en fuyant vers Paris. Celui qui a travaillé à l'usine (Jean-Pierre Bacri, dont les premières minutes d'interprétation augurent mal de la suite du film, mais ce n'est que passager) ne peut se résoudre à tirer un trait sur sa vie d'ouvrier syndiqué, et fait son deuil comme il peut. Celui dont le père s'est enfui se raccroche silencieusement à la contemplation de la rue vide et des vieux westerns de Gary Cooper auquel son père, paraît-il, ressemblait. Gary Cooper qui d'ailleurs fera une apparition remarquée et remarquable, à la lueur des éclairs et sur son cheval caracolant – mais il faut le voir pour le croire... La vie évolue au rythme des chaudes après-midi et de ses rituels (la livraison de drogue en fauteuil roulant), et chacun peu à peu parvient à se construire, à parler, à partager. A voir, vraiment.

Piera Simon
Quartier Libre Online
Juin 2009